La couture : une activité tendance ?

  • Post published:10 octobre 2023
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De nombreuses associations proposent des ateliers autour de la couture, les tutos fleurissent sur la toile, les magasins de loisirs créatifs mettent le matériel en tête de gondoles… La couture est-elle devenue une activité tendance ?

atelier couture

Les travaux d'aiguilles enseignés à l'école

Revenons en arrière, en 1882 : l’instruction est rendue obligatoire pour garçons et filles ce qui est une grande avancée. L’enseignement s’organise et peu à peu les travaux d’aiguilles intègrent l’enseignement régulier pour les demoiselles. Des manuels sont édités à destination des jeunes élèves avec de nombreux modèles pour la couture, la broderie et le tricot. Nous avons en tête les images de rangées d’élèves penchées sur un ouvrage, apprenant des points de couture sur des morceaux d’étoffes. Pourtant, les instructions officielles invitent à réduire « au minimum la confection des pièces d’études au profit des travaux utiles », dixit M. Bourqui, inspectrice de l’enseignement primaire. A l’époque, tout cela semble absolument indispensable pour contribuer à la formation de la future femme en tant que mère de famille et ménagère.

 

Dans les années 1960, de plus en plus d’écoles deviennent mixtes. Le rapport à la couture évolue : d’indispensable, elle semble finalement réductrice puisqu’elle contraint la femme à rester enfermée dans le foyer. Avec l’ouverture aux femmes des métiers intellectuels et leur émancipation, les travaux d’aiguilles sont peu à peu délaissés.

 

Dans les années 2010, la génération des quadras redécouvre l’intérêt de la couture. Dix ans plus tard, les activités manuelles sont plébiscitées, à la faveur des confinements. Des femmes très bien insérées dans la société assument ce choix. Des hommes s’y mettent, s’autorisant ce qui était impensable soixante ans auparavant.

 

Développement des propositions autour de la couture

Certains apprennent la couture en regardant des vidéos, en lisant des livres, en observant leur mère ou leur grand-mère. Apprendre à coudre un bouton ou un ourlet s’avère utile un jour ou l’autre.

A un sondage que j’ai réalisé récemment sur les réseaux sociaux, la majorité des internautes a répondu qu’ils avaient découvert la couture dans le cadre familial. Ainsi Antoine raconte :  « Je me suis contenté de la base, c’est-à-dire enfiler une aiguille et nouer le fil, ce que j’ai appris par simple observation à la maison. »

D’autres vont plus loin, comme Pauline  » J’ai appris la couture par moi-même essentiellement, vidéos et patrons glanés sur internet et essais devant ma machine. C’est aujourd’hui devenu un métier passion et une vraie reconversion pour moi.  » On imagine aisément sa satisfaction lorsqu’elle a obtenu le CAP couture en candidat libre.

La couture peut être une activité pratiquée dans le calme de son atelier ou au contraire dans un groupe, que ce soit dans le cadre d’un centre communal d’action sociale, d’un atelier de créateur ou d’une association. Ainsi, La Mine Créative, association située à L’Arbresle dans le Rhône, propose des ateliers conviviaux pour enfants et adultes. L’occasion de rencontrer d’autres personnes, de partager un moment de qualité, une passion

Découvrir la couture dès le plus jeune âge

L’initiation à la couture peut commencer très tôt. Je me souviens être intervenue dans une crèche bretonne pour animer un atelier destiné aux enfants de 2-3 ans. Ils pouvaient toucher des tissus et rubans de couleurs et matières différentes, ce qui était l’occasion d’apprendre de nouveaux mots : mou, dur, rugueux, lisse… Ensuite ils ont observé le fonctionnement de la machine à coudre et ils étaient subjugués : l’activité devait durer 15 minutes, ils sont restés 1 heure !

Dès l’âge de 4 ans, les enfants peuvent commencer à coudre. Cette activité leur permet de compléter les apprentissages scolaires :  motricité fine (tracer, découper, épingler), coordination des mouvements, lecture du patron, vocabulaire, géométrie, calcul…

Ainsi Déborah, une enseignante du  Beaujolais, a eu récemment l’idée de faire écrire à ses élèves de CM2 un conte sur le thème de l’Afrique. Ils ont travaillé en petits groupes, ont écrit le scénario, imaginé les costumes, choisi les tissus. Ils ont laissé libre cours à leur imagination pour créer des personnages merveilleux. Avec patience, les enfants ont fait face aux inexorables difficultés et ils étaient fiers de présenter leur pièce devant les élèves des classes maternelles. Ces jeunes de CM2 ont pu mettre en pratique des fondamentaux appris en classe et développer des qualités humaines de concentration, de patience, d’écoute, d’attention aux autres. Ce fut une belle expérience !

Les bienfaits de la couture

Il est arrivé que certains se mettent à la couture par soucis d’économie. Diane témoigne : « Je faisais beaucoup de cadeaux moi-même (sacs, trousses, housses de couette…).
A l’époque, dans les années 1980-1990, ça coûtait moins cher de faire soi-même… Ça a changé !!  » Aude renchérit :  « Il est vrai que quelques années en arrière, c’était nettement plus économique de faire des vêtements ;  maintenant je choisis plutôt un évènement pour faire quelque chose d’original. »

Le choix de fournitures réalisées dans des conditions éthiques ne relève pas d’un souci économique mais d’une quête de sens. L’affection pour le « fait maison » révèle une attention à l’autre : je choisis méticuleusement ce que je réalise pour m’assurer de faire plaisir. Je couds un vêtement unique, adapté à ma morphologie, en tenant compte des matières choisies. Tout cela permet de redonner du sens à nos activités : s’intéresser au mode de production, veiller à une juste rémunération du producteur, prendre conscience du temps nécessaire pour la confection, dans une recherche de transparence.

Imaginer, créer, coudre, sont bons pour le cerveau puisqu’ils lui permettent de renforcer ses capacités intellectuelles. En effet, l’apprentissage de techniques aide le cerveau à créer de nouvelles connexions, favorisant ainsi le développement des facultés cognitives. Tout couturier va nécessairement coudre et découdre, il se met à l’école de la patience. Cela peut conduire parfois à des situations de stress, ainsi que le raconte Claire : »Mon meilleur (et pire) souvenir est une robe de mariée faite en soie sauvage pour une amie : elle n’était pas prête la veille au soir… Le dernier bouton a été posé à 3 heures du matin mais quelle émotion quand je l’ai vue entrer dans l’église ! » Effectivement, le développement de la confiance en soi est souvent souligné par les psychologues car le couturier est fier de présenter ses créations. 

Ainsi les multiples bienfaits de la couture ne sont certainement pas étrangers à l’engouement que connaît cette activité depuis quelques années.

En tant que créatrice je me réjouis de pouvoir partager cette passion, en tant que mère j’estime que cet art devrait être transmis dans les écoles primaires, pour aider les élèves à gagner en confiance et leur permettre de tisser des liens entre les différentes matières enseignées.

En tant que femme, je me félicite de pouvoir exercer ce métier-passion.

Guillemette Pepin

Guillemette Pépin

Créatrice de la marque Blandine et Colomban

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